Diplomacy
Bilan du G20 : plus ou moins la même chose ou de réelles avancées ?

Image Source : Wikimedia Commons
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First Published in: Nov.20,2024
Dec.02, 2024
Les résultats du G20 - sommet qui rassemble les grands dirigeants et qui s'est tenu à Rio de Janeiro cette année - marquent sans aucun doute une série de victoires pour la politique étrangère brésilienne, mais aussi pour la communauté internationale si l'on comprend bien ce qu’un succès en termes de gouvernance mondiale représente réellement.
Tout d'abord, la déclaration du sommet du G20 est une grande victoire pour la diplomatie brésilienne, car elle réunit vingt pays différents autour de programmes politiques que tous ne soutiennent pas (comme par exemple les mesures concernant les droits de l'Homme). Pour parvenir à ce consensus, il a fallu pendant un an négocier de façon intense.
Le Brésil a obtenu un soutien sur les principaux thèmes qu'il présentait : la faim et la pauvreté, deux points qui sont toujours négligés par les pays riches; la durabilité; la bioéconomie, qui a donné lieu au premier traité multilatéral sur le sujet.
La taxation des méga-riches a également fait l'objet d'un consensus, un sujet sensible qui touche aux questions d'inégalité entre les pays et aux paradis fiscaux. Obtenir le soutien des membres du G20 en faveur de telles propositions symbolise la reconstruction des objectifs de la politique étrangère brésilienne, qui avait été raillée pendant le gouvernement Bolsonaro, et marque le retour glorieux du Brésil après des années d'isolement - qu’il s'était lui même infligé - comme pays compétent, et utile à la communauté internationale.
Deux autres points sont passés inaperçus dans certaines analyses : le sommet du G20 a permis au dialogue avec le Venezuela - un pays mouvementé - de revenir à la normale, évitant ainsi d'énormes dommages au gouvernement brésilien et préservant de bonnes relations avec le pays voisin.
Et que dire de la présence turbulente du dernier représentant de l'extrême droite latino-américaine, le président argentin Javier Milei, qui jusqu’au dernier moment a tenté d’annuler le consensus obtenu, ce que la diplomatie brésilienne a habilement évité ?
Pour en revenir aux propositions faites par la présidence et soutenues par les autres membres du groupe, s'agit-il de « plus ou moins la même chose », « imprécises », qui ne changent pas au niveau international, comme certains analystes et une partie de la presse l'ont dit hier ? Comprendre la nature des forums internationaux tels que le G20 peut permettre de répondre à cette question.
Envisagé en 1999 et officialisé en 2008, le G20 a été créé pour rassembler les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales des vingt plus grandes économies de la planète afin de traiter ensemble des crises financières de ces périodes. Suite aux crises des années 1990, un nouveau facteur avait en particulier fait surface : c'était la première fois que les problèmes économiques des pays en développement affectaient les économies centrales. Il était donc nécessaire d'élargir le champ des discussions au-delà du groupe restreint des sept (G7), un groupe de pays riches créé en 1975, et d’inclure les économies émergentes à la table des négociations. Au fil des ans, le G20 a commencé à aborder d'autres sujets que la finance et, aujourd'hui, le développement durable est au cœur des discussions et projets.
Le G20 est apparu comme un groupe non officiel doté d'une structure flexible, reposant sur une présidence où ses propres membres alternent les uns avec les autres pour organiser des sommets et des équipes qui travaillent ensemble. En outre, le G20 n'a pas de traité constitutif et n'a pas la capacité d'imposer de nouvelles normes.
À la lecture de cette brève description, la plupart des gens se demandent pourquoi un tel forum devrait exister s'il « ne sert à rien ». Mais l'informalité et la flexibilité sont les exigences mêmes des pays membres qui ont de leur propre chef choisi d'y participer. Ce sont ces caractéristiques qui permettent aux ministres et autres représentants de pays aux intérêts divergents, comme les États-Unis et la Russie, de discuter pendant près d'un an de questions qui touchent l'humanité, telles que l'éradication de la faim ou le changement climatique. Les actions concrètes dont nous avons tant besoin dépendent des efforts de chaque pays et de la pression qu’exercent leurs sociétés civiles. Les promesses d’engagement ont déjà été faites, il est maintenant nécessaire de les mettre en œuvre.
Imaginer un monde sans aucune coordination est difficile car nous avons vécu sous la gouvernance dite « faible » de l'Organisation des Nations unies (ONU) depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui, soit dit en passant, aura 80 ans en 2025. Le souvenir d'un système international constamment menacé par des guerres mondiales et dans lequel les problèmes communs n'étaient même pas débattus n'est plus qu'un pâle souvenir et c'est peut-être pour cette raison que tant de personnes dédaignent les avancées des forums internationaux tels que le G20.
Il existe aujourd'hui des entités politiques qui s'opposent à ces alliances et au niveau minimum de gouvernance mondiale que nous avons réussi à atteindre, comme l'ont montré les critiques formulées par Milei dans son discours lors de la réunion des chefs d'État et de gouvernement. Conformément à la pensée d'autres politiciens d'extrême droite, le président argentin a qualifié la gouvernance mondiale de « corset » qui étouffe les pays qui pensent différemment. Il est contradictoire que les régimes internationaux soient critiqués pour restreindre la liberté des États tout en étant accusés d'être faibles et inefficaces, ce qui démontre des critiques vides de sens qui ne servent qu'à encourager leurs partisans contre des ennemis imaginaires.
Des leaders comme Donald Trump et Milei défendent la règle du « chacun pour soi » dans les relations internationales. Cette idée fait de plus en plus d'adeptes parmi la population, ce qui fait des déclarations comme celle du G20, qui défend les principes fondamentaux des droits de l'homme et de la durabilité, un manifeste important pour ceux qui défendent encore un ordre international fondé sur les règles et la coopération. La présidence brésilienne a obtenu des résultats de grande importance pour sa politique étrangère et pour l'ordre international qu'elle cherche à préserver.
First published in :
Docteur de l'Institut de Relations Internationales de l'Université de São Paulo (IRI-USP) et coordinateur du Programme de Troisième Cycle en Politique et Relations Internationales, Fondation École de Sociologie et Politique de São Paulo (FESPSP)
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