Energy & Economics
Que devraient faire les Européens face à la rivalité entre les États-Unis et la Chine dans le domaine des technologies stratégiques clés ?
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First Published in: Jan.01,2024
Jul.01, 2024
En octobre 2023, la Commission européenne a identifié quatre domaines technologiques critiques. Les semi-conducteurs de pointe, l'intelligence artificielle (IA), les technologies quantiques et les biotechnologies.[1] Ces quatre domaines sont est fortement influencés par la rivalité technologique entre les États-Unis et la Chine, ce qui souligne l'importance pour les Européens de saisir pleinement les enjeux de cette concurrence sino-américaine. Cet article analyse cette rivalité du point de vue de la Chine et les États-Unis. Il examine les attitudes dominantes de chacun, façonnées par les événements récents, et explore leur impact sur les stratégies respectives de ces deux puissances.
Du point de vue des décideurs chinois, la concurrence géotechnologique avec les États-Unis est une nouveauté et fait l'objet d'un enseignement passif. Durant le premier mandat de Xi Jinping, le gouvernement chinois a toujours placé la technologie dans sa stratégie économique étant axée sur le développement de l'innovation. Cette approche était en phase avec l'idée que "la science et la technologie forment une force motrice essentielle" et avec les principes de "développement pacifique" établis sous Deng Xiaoping. Toutefois, vers 2018, deux sanctions visant les géants chinois des télécommunications ont profondément modifié la perception des dirigeants chinois concernant la stratégie technologique dans le contexte géopolitique.
Le premier incident impliquait ZTE, le deuxième fabricant chinois d'équipements de communication. En 2016, le gouvernement de Barack Obama a accusé ZTE d'avoir vendu à l'Iran des équipements de télécommunications contenant des puces américaines, en violation des sanctions américaines. En 2017, ZTE a plaidé coupable et a accepté de payer une amende de 1,2 milliard de dollars. Cependant, en 2018, le gouvernement de Trump a affirmé que ZTE n'avait pas respecté leur accord financier, imposant ainsi des sanctions supplémentaires sous forme de contrôles à l'exportation en avril 2018.
Le deuxième incident concerne Meng Wanzhou, alors vice-présidente et directrice financière du géant chinois de la télécom, Huawei. Elle a été arrêtée à Vancouver, au Canada, lors d'une escale en décembre 2018. Elle a été placée en détention puis à l’expulsion, à la demande du gouvernement de Trump, qui l'accusait de violations présumées des sanctions américaines contre l'Iran. Il s’agit notamment d’accusations de fraude bancaire et électronique, ainsi que des violations directes des sanctions américaines par le biais d'une filiale nommée Skycom Tech, qui aurait camouflé les activités de Huawei en Iran.
Ces deux incidents ont suscité un tollé dans les médias chinois, entraînant une montée du sentiment patriotique au sein de l'opinion publique. Cependant, pour le gouvernement chinois, l'impact et la signification de ces deux incidents étaient très différents. Dans le cas de ZTE, il s'agissait principalement de sanctions commerciales, ce qui impliquait que ZTE avait enfreint les normes commerciales et méritait donc une sanction économique. La position officielle du gouvernement chinois était que "c'était simplement un cas isolé de violation d'entreprise". Malgré cette affirmation, l'implication active du gouvernement a néanmoins politisé l'incident en Chine. Xi Jinping lui-même a négocié avec Trump pour sauver ZTE de la faillite, après quoi ZTE est devenue une entreprise d'État sous son contrôle absolu. Ce qui a finalement permis à ZTE de gagner une part de marché intérieur plus importante que celle de Huawei. Sur le plan international, les négociations à grande échelle ont évité que l'incident ZTE ne politise trop les tensions commerciales existantes entre les États-Unis et la Chine.
Bien que l'épisode impliquant ZTE ait été réglé sans trop de rancœur, les hauts fonctionnaires chinois ont exprimé leur inquiétude quant à l'impact potentiel des États-Unis sur les entreprises technologiques stratégiques de la Chine [2]. En novembre 2018, Tan Tieniu, alors secrétaire général adjoint de l'Académie chinoise des sciences, a souligné aux hauts dirigeants chinois qu'ils devaient tirer des leçons de l'incident ZTE. Il était devrait éviter de trop dépendre des importations de composants électroniques de base et de puces, et de ne pas répéter les mêmes erreurs qu’avec ZTE. Le même mois, Xi Jinping a souligné dans un discours que "sur le plan international, l'obtention de technologies avancées et de technologies clés devient de plus en plus difficile... cela nous oblige à suivre la voie de l'autosuffisance". Des termes tels que "sécurité technologique", "points d'étranglement" (卡脖子), et "technologies de base dans des domaines clés" ont été employés dans le discours de Xi Jinping.
L'expression "关键核心技术" a commencé à apparaître fréquemment dans le discours officiel chinois. Elles reflètent l'opinion des dirigeants chinois de l'incident ZTE, lequel influe à son tour sur les stratégiques de la compétition géopolitique en matière de technologie avec les États-Unis.
C'est l'incident impliquant Meng Wanzhou, survenu à la fin de l'année 2018, qui a convaincu les dirigeants chinois de la nécessité d'un ajustement stratégique. Tout comme dans l'affaire ZTE, Huawei a été impliqué dans une violation commerciale qui, du point de vue chinois, aurait dû entraîner une sanction pour l'entreprise. Au lieu de cela, un mandat d'arrêt personnel a été émis à l'encontre de Meng, transformant ainsi une affaire commerciale en un incident politique et diplomatique. Le vice-ministre des Affaires étrangères, Le Yucheng, a convoqué d'urgence les ambassadeurs des États-Unis et du Canada en Chine et a fortement protesté. Le gouvernement chinois a également arrêté deux citoyens canadiens en Chine, condamnant l'un d'eux à 11 ans de prison. L'ambassadeur de Chine au Canada a déclaré que l'affaire Meng Wanzhou était un "acte politique prémédité dans lequel les États-Unis utilisent leur pouvoir de régime pour évincer une entreprise chinoise de haute technologie pour des raisons politiques".
Un mandat d'arrêt personnel a été émis à l'encontre de Meng, transformant ainsi une affaire commerciale en un incident politique et diplomatique.
Ces deux incidents ont profondément influencé et renforcé la réflexion stratégique des dirigeants chinois concernant la concurrence technologique géopolitique avec les États-Unis. Le 14ᵉ plan quinquennal publié par le Parti communiste chinois en 2020 a établi "l'autonomie technologique" comme un objectif stratégique majeur. Progressivement, tous les documents officiels ont adopté un ton axé sur l'autosuffisance dans la stratégie technologique de la Chine.
Avant ça, la Chine avait poursuivi une stratégie de réassurance, en démontrant sa volonté de coopérer avec les États-Unis et leur système. En théorie, la Chine disposait de deux options stratégiques : celle de la confiance et/ou de la dissuasion. La première consistait à maintenir une attitude conciliante envers les États-Unis et leurs alliés, dans l'espoir d'apaiser les tensions et peut-être de réintégrer le réseau dirigé par les États-Unis. Cette stratégie de confiance avait permis à la Chine de gagner du temps pour un développement stable, suivant la logique du "profil bas" initiée à l'époque de Deng Xiaoping. Cependant, le gouvernement de Xi Jinping a choisi la seconde option, la dissuasion. Cela impliquait de démontrer sa force ou d'utiliser des contre-mesures pour réduire la probabilité de nouvelles actions restrictives ou d’échanges commerciaux désavantageux de la part des États-Unis. Mais pour que cette stratégie de dissuasion fonctionne, Xi Jinping a considéré que la Chine devait acquérir des solides compétences dans des domaines technologiques clés. Ainsi, Xi a d'abord mobilisé les ressources nationales de recherche et développement et a tenté de se doter de technologies de pointe avant de recourir à des contre-mesures diplomatiques. La logique fondamentale qui sous-jacente de cette stratégie technologique géopolitique est celle de la "dissuasion défensive".
Un exemple typique de cette stratégie concerne l'industrie des semi-conducteurs. Confronté aux contrôles des exportations d'équipements de semi-conducteurs venant des États-Unis, des Pays-Bas et du Japon, le gouvernement chinois a d'abord intensifié les investissements en recherche et développement dans ce secteur, cherchant à surmonter les barrières technologiques existantes (l’effet du “points d'étranglement”). Par conséquent, l'investissement de la Chine dans la R&D sur les semi-conducteurs est passé de 10 milliards de dollars en 2018 à 25 milliards de dollars en 2022, soit une augmentation de 150 %. Simultanément, le gouvernement chinois a augmenté les investissements dans la production de matières premières essentielles (silicium, nitrure de gallium, etc.) et dans les infrastructures de production de semi-conducteurs. Il a également dirigé les efforts des industries en amont tout en favorisant l'intégration de politiques visant à renforcer la sécurité et l'efficacité de la chaîne d'approvisionnement.
La politique chinoise a également cherché à accroître la dépendance de la chaîne d'approvisionnement internationale à l'égard de la Chine. Elle a tirer profit de ses avantages concurrentiels dans l'industrie des semi-conducteurs (et même dans d'autres secteurs) pour se prémunir contre les actions des États-Unis et de leurs alliés. Par exemple, dans l'industrie des puces automobiles, dans l'approvisionnement de matières premières et sur les marchés des équipements de semi-conducteurs, la Chine a cherché à exploiter ses avantages concurrentiels de façon significative. En août 2023, le gouvernement chinois a annoncé un contrôle strict des exportations de gallium et de germanium, deux matériaux essentiels à la fabrication des semi-conducteurs.
La Chine a cherché à utiliser ses importants avantages concurrentiels.
La Chine cherche à renforcer son pouvoir réglementaire
En plus de réagir aux politiques perçues comme des mesures de maîtrise des États-Unis dans le domaine de la technologie, la Chine a adopté une autre approche stratégique. Cette approche a été dirigée par le ministère des Affaires étrangères (MAE) et le ministère de l'Industrie et des Technologies de l'information (MIIT). Cette troisième approche visait à accroître son pouvoir réglementaire, en particulier dans les domaines de l'intelligence artificielle (IA) civile, où la Chine détient un potentiel considérable. [3] À partir de 2018, le gouvernement chinois a manifesté une fort volonté à introduire et à étudier l'éthique et les normes techniques de l'IA. [4]
S'appuyant sur ces cadres politiques nationaux, diverses initiatives diplomatiques et propositions de normes, le MAE et le MIIT ont renforcé l'influence réglementaire de la Chine dans le domaine de l'IA. Par exemple, en 2020, le MAE a lancé “l’Initiative mondiale pour la sécurité des données", suivie en 2023 de “l'Initiative mondiale pour la gouvernance de l'intelligence artificielle". Le ministre Wang Yi a explicitement déclaré : "Nous espérons fournir un plan pour les discussions internationales et l'élaboration de règles". L'Institut chinois de standardisation électronique, rattaché au MIIT, participe également activement à l'élaboration de normes internationales pour les nouvelles technologies.
Passage au peigne fin : Perspectives sur les Attitudes et Stratégies Américaines
Le gouvernement de Joe Biden maintient généralement une position vis-à-vis de la Chine assez similaire à celle de son prédécesseur, Donald J. Trump, en ce qui concerne les technologies stratégiques. Cela se regroupe particulièrement dans le domaine des technologies concurrentielles telles que la 5G/6G, les processeurs spécialisés destinés à répondre aux exigences de calcul de l'IA, l'informatique quantique et les véhicules électriques (VE). S'inspirant de la stratégie de Ronald Reagan pendant la guerre froide, qui visait à surpasser l'Union soviétique, le président Biden a lancé un ambitieux plan d'infrastructure de 2 250 milliards de dollars.
Ce plan, qui rappelle la politique chinoise axée sur l'augmentation de l'innovation et de la puissance nationales, alloue des fonds à des secteurs. Parmi eux, on retrouve celui des transports, l'industrie manufacturière, les énergies renouvelables, l'eau propre et le haut débit pour les technologies filaires et sans fil. Ces investissements, intégrés dans la politique Build Back Better World Act (BBB) et ensuite incorporés dans l'Inflation Reduction Act (IRA) ainsi que le Creating Helpful Incentives to Produce Semiconductors (CHIPS) and Science Act, sont justifiés par la nécessité de répondre aux objectifs ambitieux de Xi Jinping visant à doubler l'économie chinoise d'ici 2035. Ils ont aussi l’intention de faire de la Chine un leader mondial dans les domaines de la biotechnologie, de l'énergie verte et de l'intelligence artificielle.
S'inspirant de la stratégie du président américain Ronald Reagan pendant la guerre froide, qui visait à surpasser les dépenses de l'Union soviétique, le président Biden a lancé un plan d'infrastructure de 2 250 milliards de dollars.
En plus d'une stratégie de dépenses visant à renforcer la compétitivité des États-Unis dans les technologies stratégiques, le gouvernement de Biden a maintenu certaines sanctions de Trump. Par exemple, le président Biden a maintenu des droits de douane s'élevant à environ 300 milliards de dollars. De plus, il a continué d'appliquer des sanctions à l'égard de Huawei, une entreprise qui possède le potentiel de surpasser la concurrence dans la technologie des réseaux mobiles 5G/6G. Sous le gouvernement de Trump, le Bureau de l'industrie et de la sécurité a exclu Huawei des chaînes d'approvisionnement mondiales en semi-conducteurs. Il l’a également placée sur la liste des entités du département du Commerce, obligeant ainsi les entreprises américaines à obtenir une licence avant d'exporter vers Huawei.
De plus, comme mentionné précédemment, le gouvernement de Trump a également engagé des poursuites pour fraude contre la directrice financière de Huawei, Mme Meng. Bien que le président Biden ait maintenu les interdictions sur les ventes de biens américains à des entreprises comme Huawei, ainsi que les restrictions sur les exportations de technologies critiques américaines, il a rapidement résolu le différend concernant Mme Meng. Quelques heures après l'accord conclu pour sa libération, les deux hommes impliqués dans ce jeu de diplomatie de l'otage ont quitté la Chine à bord d'un vol pour le Canada. Mettant en lumière la nature politique de l'incident, Meng a été accueillie par des hauts fonctionnaires locaux à son retour en Chine, à l'aéroport.
Encourager le multilatéralisme pour relever les défis mondiaux
Outre les mesures énergiques, le gouvernement de Biden a également cherché à adopter une position plus nuancée. Parmi les éléments qui suggèrent une approche moins brutale à l'égard de la Chine, on note l'accent mis sur la collaboration face à des défis mondiaux tels que le changement climatique et les pandémies futures. M. Biden a encouragé l'engagement par le biais de réunions de haut niveau, comme celles du secrétaire d'État Antony Blinken et du conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan avec leurs homologues chinois Yang Jiechi et Wang Yi à Anchorage, en Alaska, en mars 2021. Bien que ces entretiens aient été plus tendus que prévu, ils ont permis d'entamer un dialogue entre les deux parties.
De même, Joe Biden a cherché à renforcer le dialogue avec la Chine dans les forums multilatéraux et dans les organisations où ils sont tous les deux membres. Par exemple, le forum de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC) qu'il a accueilli en novembre 2023. Le choix de San Francisco comme lieu de réunion se voulait conciliant, car la ville entretient des liens historiques avec l'Asie et joue un rôle central dans la technologie mondiale en tant que siège de la Silicon Valley.
Il faut toutefois garder à l'esprit qu'en définissant une stratégie à l'égard de la Chine, Joe Biden doit également composer avec un Congrès et une opinion publique de plus en plus sceptiques vis-à-vis des relations commerciales avec la Chine. Beaucoup considèrent que ces relations entraînent la perte de bons emplois et permettent à la Chine cherche à espionner les infrastructures des États-Unis. Les dirigeants de la commission spéciale de la Chambre des représentants sur le parti communiste chinois, le républicain Mike Gallagher et le démocrate Raja Krishnamoorthi, dirigent l'un des derniers remparts du bipartisme à Washington et jouent un rôle clé dans l'évolution de la position des États-Unis envers la Chine. Avec ses nombreuses enquêtes, citations à comparaître et recommandations politiques, cette commission est devenue le "le cœur battant" de la politique du Congrès américain en matière de Chine. En ce qui concerne la technologie, elle plaide fermement en faveur d'une dissociation séléctive avec la Chine pour des raisons de sécurité nationale. [5]
Une voie à suivre
Face aux stratégies de dissociation ou de neutralisation des États-Unis et à la stratégie de dissuasion défensive de la Chine, quelles mesures les pays européens pourraient-ils prendre pour naviguer dans les eaux troubles et controversées des technologies stratégiques ? Les Européens peuvent-ils également prendre des initiatives pour pouvoir diminuer l'impact de leur propre vulnérabilité en matière de technologies stratégiques ?
Tout d'abord, reconnaissant le rôle central de la technologie dans l'économie mondiale qui se numérise rapidement, les Européens doivent souligner qu'il est dans l'intérêt collectif de tous d'établir des institutions, des normes et des politiques pour une gouvernance mondiale efficace. Plutôt que de s'engager dans des manœuvres géopolitiques réactives ressemblant à un jeu d'échecs, ces institutions pourraient se concentrer sur la construction d'une base plus coopérative pour les secteurs technologiques fondamentaux.
Deuxièmement, parallèlement à cette reconnaissance, des efforts pourraient être déployés pour développer des institutions, des politiques et des normes futures qui définissent des standards pour les technologies sensibles d’une prochaine génération. Ces initiatives devraient tenir compte des avancées déjà réalisées par les Chinois et les Américains. Elles pourraient également coïncider avec une troisième approche consistant à encourager le gouvernement de Biden à adopter une stratégie multilatérale globale. Les États-Unis doivent promouvoir la collaboration au-delà de questions telles que le changement climatique et l'inégalité économique, afin d'englober des domaines technologiques où la concurrence est intense, comme ceux évoqués dans cet article. D'une part, les Européens pourraient souligner que les stratégies américaines de neutralisation ne fonctionnent pas toujours comme prévu et pourraient même se retourner contre eux en accélérant les avancées technologiques chinoises. Par exemple, en septembre 2023, Huawei a lancé le smartphone Mate 60 Pro équipé d'une puce nationale de 7 nm, révélant que la Chine avait surmonté certains obstacles que les interdictions américaines visaient à bloquer. [6]
Étant donné l'incertitude quant à la durabilité de la stratégie de dissuasion de la Chine, qui pourrait évoluer vers une dissuasion plus offensive et l'instabilité politique potentielle aux États-Unis, les Européens ont de nombreuses raisons de promouvoir un dialogue plus souple entre la Chine et les États-Unis. Il est crucial de reconnaître que la compétition technologique sino-américaine est davantage une construction narrative qu'une réelle représentation de la situation actuelle. Le fait que les deux parties perçoivent l'autre comme ayant déclenché ce qu'on appelle la "nouvelle guerre froide" n'encourage pas un comportement propice à soutenir la vision de l'autre. [7] Certains acteurs fautifs utilisent des tactiques similaires de dénigrement pour obtenir un avantage politique. [8]
En réalité, la compétition technologique entre la Chine et les États-Unis est fondée sur la concurrence industrielle, la rivalité entre entreprises et les litiges en matière de propriété intellectuelle. Cependant, les relations entre les deux pays dans le domaine de la haute technologie ont également été caractérisées par la complémentarité et la collaboration. La Chine, les États-Unis et les parties prenantes européennes doivent être attentifs aux récits qu'ils adoptent, de peur qu'ils ne deviennent une prophétie autoréalisatrice.
Ce travail a été financé par le projet REMIT, soutenu par le programme de recherche et d'innovation Horizon Europe de l'Union européenne, dans le cadre de la convention de subvention n° 101094228.
Références :
[1] Recommandation de la Commission européenne du 3.10.2023 sur les domaines technologiques critiques pour la sécurité économique de l'UE en vue d'une nouvelle évaluation des risques avec les États membres.
[2] Gregory C. Allen. 2023. China's New Strategy for Waging the Microchip Tech War", csis.org, 3 mai.
[3] Jing Cheng et Jinghan Zeng. 2023. Shaping AI's Future ? China in Global AI Governance". Journal of Contemporary China 32(143) : 794-810.
[4] Voir le livre blanc sur la normalisation de l'IA, un guide pour l'élaboration d'un cadre normatif national pour l'IA de nouvelle génération, un rapport sur les normes éthiques pour l'IA de nouvelle génération, un livre blanc sur l'IA digne de confiance ainsi que d'autres documents réglementaires.
[5] Robbie Gramer. 2023. The Masterminds : Washington veut durcir le ton à l'égard de la Chine, et les dirigeants de la commission de la Chambre des représentants sur la Chine sont aux commandes", foreignpolicy.com, 27 novembre.
[6] Weiwen Wang. (2023). 'China Breaks Through 7nm Chip Technology, Has the China-U.S. Tech War Entered Phase 2.0?' (中国突破7纳米芯片技术 中美科技战进入2.0阶段?). Lianhe Zaobao (联合早报), 17 septembre. Consulté sur https://www.zaobao.com.sg/news/china/story20230917-1433739.
[7] Patricia M. Kim, Matthew Turpin, Joseph S. Nye Jr, Jessica Chen Weiss, Eun A Jo, Ryan Hass et Emilie Kimball. 2023. Les États-Unis doivent-ils poursuivre une nouvelle guerre froide avec la Chine ? Brookings.edu, 1er septembre.
[8] Roberta N. Haar. 2020. La Chine remplacera-t-elle les États-Unis en tant que puissance prédominante dans le monde ? Atlantisch Perspectief 44(3):9-13.
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Roberta N. Haar est professeur d'analyse de politique étrangère et de relations transatlantiques dans le domaine des relations internationales. Elle donne des cours de relations internationales, notamment de politique étrangère. Elle est la chercheuse principale du projet REMIT EU Horizon, pour lequel la Commission européenne et le Royaume-Uni ont accordé 3 millions d'euros sur quatre ans. Le consortium REMIT se compose de 9 institutions partenaires dans 8 pays européens avec plus de 40 chercheurs. Les publications récentes du professeur Haar incluent : « Conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie sur la position des États-Unis en Europe » (2022) Atlantisch Perspectief, 46(3), 14-18. The Making of European Security Policy: Between Institutional Dynamics and Global Challenges (2021), qui fait partie de la série Routledge « Studies in European Security and Strategy » et co-édité avec Thomas Christiansen, Sabina Lange et Sophie Vanhoonacker ; « Foreign Policy Change from an Advocacy Coalition Framework Perspective » (2021) avec Jonathan Pierce dans International Studies Review ; « Les vues incompatibles de l'administration Biden sur le multilatéralisme (2021), Atlantisch Perspectief, 45(5), p. 20-24 ; « L'échec des entrepreneurs en politique étrangère dans l'administration Trump » (2021), avec Lutz F. Krebs dans Politics & Policy ; « Insurrection et politique étrangère américaine : le cas de George McGovern » (2017) dans World Affairs.
Le Dr Haar rédige également une chronique intitulée Across the Atlantic dans le magazine national néerlandais EW https://www.ewmagazine.nl/auteur/roberta-n-haar/.
Hengyi Yang est chercheur doctorant au sein du projet EU Horizon Reignite Multilatéralism via Technology (REMIT) coordonné par l'Université de Maastricht, sous la supervision du professeur Roberta Haar et du Dr Catherine Lo.
Ses intérêts de recherche incluent la grande stratégie et la politique technologique de la Chine, les sciences sociales informatiques et les études critiques sur la sécurité. Il s’intéresse particulièrement aux questions liées (1) aux grandes stratégies de la Chine et à ses coalitions nationales ; (2) les récits et discours de la Chine liés à son essor mondial ; et (3) l’anxiété croissante dans les relations internationales.
Avant de rejoindre l'UM, Hengyi a vécu à Barcelone pendant deux ans au cours de son master de recherche à l'Institut Barcelona d'Estudies Internacionals. Il a obtenu sa licence en diplomatie à l'Université des études étrangères du Guangdong. Il a également co-fondé le Centre Saint-Pierre pour la sécurité internationale (SPCIS), un groupe de réflexion social indépendant axé sur la sécurité mondiale non traditionnelle et basé à Guangzhou, en Chine.
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